Accouchement : partenaire confiant, mère confo.
Crédit photo: LALOBA photo | doula | création
Hommes* de bonne volonté, soucieux de soutenir votre conjointe pendant l’accouchement et de bien vivre la naissance de bébé, salut!
Drôle d’époque, non? On vous veut tout proches; pendant la grossesse, impliqués ensuite avec les enfants, pendant l’accouchement aussi. On vous veut; forts, tendres, sensibles, empathiques, stables, calmes, instinctifs, dynamiques, joueurs, rassurants, travaillants, émotifs, confiants, créatifs, attentifs. Sans avoir nécessairement eu de modèle aussi multi-colorié.
Non au syndrôme du tabouret !
Vous voilà donc maintenant à attendre votre bébé. Ça se prépare. Ça s’approche. Et vous vous dites : "L’accouchement. C’est comment? J’ai pas envie d’être assis à regarder ça en me sentant impuissant". Et votre père ne peut pas toujours vous répondre. Parce que pas plus tard qu’il y a 30-40 ans, les pères n’étaient pas invités en salle d’accouchement. "Qu’est-ce que je peux faire pour aider ma blonde ?", que vous vous dites ?
On va regarder ça un peu.
Mettons donc d’abord une petite base à cet article; souvent, on n’a besoin de ne rien faire pendant un accouchement. Souvent, les femmes trouvent leur chemin et ACCOUCHENT. Ne rien faire mais être là. Confiant, patient, calme. Mais pour arriver à être bien à ne rien faire pendant un accouchement, il faut souvent une préparation… car si c’est vrai que l’accouchement amène la femme dans des états décrochés de la vie "normale", c’est aussi vrai que d’être le témoin non-informé de cet acte puissant peut être marquant. Qu’on se le dise, une femme qui accouche c’est fort comme une tornade, et tant qu’à frôler la tornade aussi bien la comprendre un peu…. ça fait moins peur.
Je me souviens de ma 2e présence à un accouchement. Un accouchement ultra-rapide à domicile. Je devais m’occuper de la grande sœur de 3 ans. Qui, finalement, dormait. On m’a alors invitée dans la chambre quelques minutes avant l’accouchement. Moi, 20 ans environ, je me suis mise en petite boule dans le coin. Et j’ai assisté à l’acte le plus puissant que j’avais vu jusqu’alors. Une femme qui accouche par elle-même, debout. Un bébé qui naît, qui respire. Je me suis sentie transportée mais aussi extrêmement vulnérable, avec l’impression de pouvoir tout gâcher, tout casser si je bougeais un orteil. Toute petite devant la puissance de la vie qui traverse le corps d’une femme. J’ai même eu une révélation : My God, c’est un animal ! Hé oui.
Alors voilà pour vous qui accueillerez votre bébé bientôt. Des pistes. Vous pouvez faire suivre aussi à toutes les personnes présentes autour d’une femme qui accouche; conjoint.E, ami(e), soeur, infirmier.E, sage-femme, doula, médecin, grand-mère, alouette etc.
1- Avoir confiance en la femme.
Son corps sait comment accoucher. Son bébé veut naître. L’accouchement est un processus physiologique involontaire. Un réflexe. Même une femme qui, dans la vie de tous les jours, répugne à se mettre dans des situations difficiles ou ne supporte pas la douleur, trouvera son chemin pour accoucher si elle sent que les personnes autour d’elle ont confiance en elle.
Elle aura peut-être besoin qu’on lui dise quelques fois pendant son accouchement, qu’on sait qu’elle y arrivera. Parce que parfois, quand le col utérin est presque tout ouvert autour de la tête du bébé, on pense qu’on ne peut plus le faire. Parfois, on a besoin que quelqu’un d’autre porte la confiance, le temps qu’on la retrouve.
Si on doute de la capacité d’une femme à accoucher, elle le saura. Et ça la perturbera.
2-Connaître un peu l’accouchement normal…et les possibles variantes.
Pour rester confiant.
Un accouchement, ça peut durer (très) longtemps. On ne se précipite pas à l’hôpital dès les premiers signes. On attend, dans une situation normale, que les contractions soient bien régulières, reviennent aux 5 minutes et soient assez fortes pour que la femme ait besoin de respirer pendant ses contractions. Combien de temps ça peut prendre pour en arriver là ? Entre 10 minutes et….. 14 jours ! Rien ne sert d’arriver trop tôt à l’hôpital et de chercher des contractions dans les escaliers…. Rien ne sert non-plus de minuter toutes les contractions pendant ces heures. Même une fois que les contractions ont atteints cette régularité/intensité, la naissance peut encore prendre en moyenne 18h pour un premier bébé. (Apportez-vous de la nourriture de survie, mais qui ne sent rien et ne fait pas de bruit)
Si l’accouchement débute par une rupture de membranes (crever les eaux), il est suggéré de partir pour l’hôpital… Mais on n’accouche pas nécessairement en 10 minutes comme on voit dans les films. Prenez le temps de manger, de vous rapprocher un peu…. C’est la fête, votre bébé s’en vient ! On a le temps de se rendre à l’hôpital… Vraiment.
Rester confiant.
Il y a un détail avec les femmes qui accouchent… C’est qu’en leur qualité de bonnes mamans, elles sont à l’affût de tout danger. Pour pouvoir se sauver si un tyrannosaure s’approche. Et mettre leur bébé au monde en sécurité. Les femmes ont besoin de silence, de chaleur, d’amour, de liberté, de patience et de sécurité pour accoucher. C’est même la base.
Votre blonde, elle va partir dans son monde, avec votre bébé. Elle ne pourra plus s’occuper du reste, des autres, de sa carte d’hôpital, du temps, de RIEN. Être présent auprès d’une femme qui accouche c’est aussi accepter ce changement d’état chez elle. Elle ne parlera plus. Elle voudra dormir entre ses contractions. Elle ne comprendra plus facilement ce que les autres lui diront. Elle trouvera agressante la lumière forte, les conversations, les bruits, les odeurs même. Elle fera peut-être des (gros) sons. Elle respirera profondément, elle bougera pour trouver ce qui la soulage. Elle ne fera plus de phrases complètes. Elle s’approchera un peu de son animalité. Elle voudra un gros câlin et une doudou et l’instant d’ensuite des glaçons dans le front. C’est normal. Et c’est beau. On n’a qu’à suivre et ne rien prendre personnel. ;) Arrêter de lui parler quand elle arrête de parler, ça va vraiment l’aider. Vous pouvez dire à l’équipe qui vous suit de s’adresser d’abord à vous, sauf en cas d’urgence. Faire l’admission, répondre aux questions sur les allergies et le désir d’allaiter ou la soupe qu’elle préfère, ça va vraiment aider votre conjointe à rester dans sa bulle, avec bébé.
Rester confiant.
Et pour la poussée… elle saura quand pousser. Ça va pousser. Croyez-moi, quand on a un bébé entre les pattes on le sent. Parfois on a besoin de se faire rassurer… C’est normal que ce soit lourd, que ce soit chaud. C’est bébé qui avance… Et si vous regarder votre bébé arriver, vous le verrez peut-être remonter se cacher entre les contractions. Normal.
Ah ! Et votre blonde, elle accouchera probablement autrement que sur le dos, si elle suit ses sensations. Vous pourrez l’aider à bouger. Il y a même une application pour s’inspirer.
Voir fin du point #1
3- Boycotter les images de peur
Obligatoire. On en a assez vu, des images d’urgence, de peur, de sauvetage, de violence même. Dans les faits, il est très rare qu’une situation urgente se présente. La grande majorité des accouchements de femmes en bonne santé pourraient se passer sans interventions (95% selon l’OMS). Alors là, le temps est venu de regarder, lire ou écouter de belles histoires d’accouchement. Pour vous remplir l’inconscient de confiance. Pour peut-être aussi avoir vu de quoi une femme peut avoir l’air quand elle accouche et que tout va bien. Voir comment on bouge, on respire, on se repose entre les contractions.
Fini les séries qui font peur, exit les scènes de sauvetage. Ça.ne.sert.à.rien. À rien d’autre qu’à faire peur et diminuer la confiance en la capacité des femmes à accoucher. Ça rend tout le monde extra-tendu et quand on est tendue on n’accouche pas aussi facilement. Vous le direz à votre blonde aussi.
Voir fin du point #1.
4- Res.pi.rer.
Oui oui, respirer. C’est si simple. Mais on ne sait pas toujours comment, ou on oublie. Respirer profondément pendant un accouchement permet à tout le monde de rester présent. Ne pas entrer dans la peur. Respirer quand l’intensité monte très haut. Respirer quand la tête nous chuchote ses inquiétudes. Respirer avec la femme qui accouche pour qu’elle s’accroche à sa respiration et qu’elle surfe sur sa vague. Respirer, toujours.
Être à côté de quelqu’un qu’on aime qui traverse des moments aussi intenses peut nous chambouler. Homme, femme, enfant, vieux, tout le monde. Le stress des personnes autour d’elles, le corps d’une femme qui accouche le capte et le traduit en tyrannosaure. Ça peut stopper l’accouchement ou le rendre plus douloureux, rien de moins. Voilà l’importance de revenir au calme quand on est à côté d’une femme qui accouche.
Pour offrir une présence bienveillante et stable, la respiration est un outil merveilleux. Je vous envoie vers ce petit exercice tout simple; il serait bien d’essayer de le mettre en pratique dans la vie de tous les jours, bien avant un accouchement. Ça va servir, promis. (Au pire ça va servir quand votre terrible two refusera catégoriquement de s’asseoir dans son siège d’auto un mercredi matin de verglas, alors que vous êtes déjà en retard. Dans 2 ans environ.)
5- Demander de visiter le lieu de naissance
Aller voir le lieu où l’accouchement est prévu est important… Et malheureusement pas offert partout. Cette visite prénatale devient nécessaire quand on comprend comment le sentiment de sécurité est important pour accoucher. En visitant les chambres de naissance, on peut demander de manipuler le lit, de savoir où sont les ballons, les débarbouillettes, les piqués, les glaçons, les gros bols, le bain…. Et ainsi se sentir un peu plus chez soi. Le stress baisse d’un niveau, hourra. Pas de tyrannosaures, chez soi. (Et si votre conjointe veut apporter des odeurs, doudous, oreillers de la maison, c’est pour se sentir en sécurité. Malheureusement, pas de zoothérapie possible en salle d’accouchement encore.)
6- ….. inviter une doula ( je me gâte)
Je persiste et signe: une bonne préparation à l’accouchement est essentielle pour démystifier le processus d’accouchement, prendre confiance en la capacité de la femme à accoucher, diminuer la peur, développer des outils de gestion du stress et de soulagement.
C’est tout ça que l’on fait, les doulas, en prénatal. Nous offrons aussi un espace au partenaire pour seulement vivre son passage pendant l’accouchement… Avec les émotions qui l’accompagnent. Les pères me disent souvent que seulement de savoir qu’ils ne sont pas le seul soutien continu pour leur conjointe pendant l’accouchement, cela leur permet d’aborder l’expérience plus sereinement. Et que de me voir sourire quand l’intensité monte très haut les rassure et leur permet de continuer en sachant que tout est normal…
…Et de se laisser transporter par la grande beauté du phénomène au jour de la naissance !
*Les mots hommes, pères, conjoints sont majoritairement utilisés dans ce texte pour décrire les partenaires d’une femme qui accouche. Simplement, car dans notre pratique de doula et dans la société, c’est ce qui est le plus fréquent. Mais un accouchement entre femmes, entre ami(e)s, en famille, c’est magnifique aussi. Merci d’interpréter ce texte en l’accordant doucement avec votre réalité.